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4 août 2014 1 04 /08 /août /2014 18:37
 

Josiane rêvait en couleurs et s'habillait toujours de noir. Elle avait l'esprit en fête, la mine terne, la pensée habile, la main gauche. Elle avait perdu la droite dans un accident stupide. Un portail acéré, un courant d'air ou son frère, enfin bref un enchaînement qui l'obligeait maintenant à porter un avant-bras en cire. Josiane enseignait les mathématiques. Les enfants la rendaient aigre, les chiffres lui donnaient l'air austère. Chaque année, elle effrayait les petits sixièmes avec son bras ballant qui heurtait parfois un élève distrait. Pour éviter ce genre d'incident, elle devait le tenir contre elle de sorte qu'elle professait les bras croisés. Lorsqu'elle était fatiguée, elle le posait délicatement sur le bureau. Parfois il lui échappait et c'est un bruit sourd qui résonnait alors dans la classe, épouvantant les enfants.

Josiane connaissait plus de problèmes avec les cinquièmes. Plus turbulents et surtout moins effrayés, ils profitaient du manque de sensation du membre factice pour le faire fondre avec leur briquet. Malgré les réprimandes, les colles et les convocations des parents, c'était devenu un challenge pour qui muait de devenir un homme. La légende disait qu'un certain Sébastien Mayet avait réussi à faire disparaître entièrement le pouce sans s'être fait prendre.

 

Bien que tout le collège connaissait cette histoire, personne n'avait partagé le parcours scolaire de ce Sébastien, sauf peut-être le pion qui était un ancien élève. Thierry Chaussette comme le surnommait les écoliers tant il émanait de lui u ne odeur âcre. Le visage constellé de cicatrices rouges relatives à une acné féroce, il poursuivait l'œuvre de sa mère au lieu de suivre les penchants alcooliques de son père. Bien qu'appréciant les paradis artificiels, il préférait les fumer que les boire. Question de génération. Thierry tentait bien de faire valoir ses diplômes des hautes écoles de commerce mais son physique le desservait tellement qu'il ne dépassait jamais le stade de l'entretien. Par facilité, il gardait cet emploi de pion qu'il occupait depuis douze ans déjà et par dépit il se vengeait sur les jeune à l'avenir prometteur. Il développait aussi une forte animosité envers les enseignants et il fallut une bourrade virile du prof de sport pour qu'elle ne dépasse pas les limites de la correction.

 

Cette mise au point, ou au pli, coïncida avec l'arrivée d'une nouvelle enseignante. Laure Calvi remplaçait la déprimante Ginette Bauch aux arts plastiques. Fraîchement titulaire, elle souriait chaque matin. Généralement court vêtue, poitrine généreuse et faciès avenant, elle fit tout de suite l'unanimité auprès de la gente masculine. La salle des professeurs devint moins enfumée, Thierry plus silencieux et plus rouge, et les enseignants plus fourbes, surtout celles dont la beauté semblait tout d'un coup défraîchie. Les cours de dessin connurent un regain d'intérêt et nombreux furent les élèves de troisième qui désirèrent s'inscrire aux beaux-arts. Cela fit quelques remous dans les familles qui souhaitaient guider leur progéniture vers des études aux débouchés plus concrets. La réunion semi-annuelle parents-profs permit de régler ces différends, surtout auprès des pères.

 

Célibataire, Laure fit tourner bien des têtes. M. Rogon, professeur d'histoire géographie, second du collège, fut le premier à craquer. Cet homme si barbu, ce Raspoutine à la toque seyante rentra en éruption dès que Melle Calvi fit son apparition. Un coup de foudre au sens premier du terme. Dès le lendemain, il entreprit une cour assidue. Fleurs en bouche, agressivité en poing. Les autres males devaient se tenir loin de Laure sinon le tsar des récréations entraient dans des fureurs que seuls les frustrés peuvent développer. Chantant à tue-tête au moindre sourire, il plongeait dans des profondeurs de noirceur dès qu'elle oubliait de le saluer. La situation dégénéra au point où il omettait d'être présent à ses cours pour suivre ceux de dessin. Il réclama même des cours particuliers que naïvement Laure accepta. La pressant de lui tenir le poignet pour le croquis d'un vase, il s'emporta comme un buffle en rut. Plaquée sur le bureau, elle ne dut son salut qu'à ses larmes. Rugon revint à lui devant le tableau de sa madone en pleurs. Il s'enfuit du collège et jamais nous ne le revîmes. La place du second de l'établissement se libérait en même temps que le périmètre de sécurité autour de Melle Calvi. Hormis Laure, tous les professeurs complotèrent dans leur ombre pour décrocher soit l'une soit l'autre, soit les deux faveurs.

 

Chacun endossa un rôle sur la scène de l'ambition. Le plus assuré fut sans nul doute M. Carminatto, professeur de sport. Bien que marié, il ne lésina pas sur les hauts moulants, affichant pectoraux et biceps en saillis. La blague grivoise et les cheveux gominés, il excellait dans le ridicule sans pour autant que quiconque ne lui fasse remarquer. La mésaventure de Thierry avait frappé les esprits. Laure s'en amusait. Elle le croqua si bien qu'elle en fit une galerie de caricatures. Dégonflé mais pas abattu, il se fixa sur le poste de second arguant de son ancienneté. Cette promotion lui semblait nécessaire pour convaincre Melle Calvi de ses attraits hors du commun.

 

Les femmes enseignantes intriguèrent auprès de Laure pour qu'elle occupe toute l'attention des hommes. Elles s'efforcèrent à paraître vieillies, austères, responsables. Non seulement elles mettaient en évidence les charmes du professeur de dessin, mais en plus, elles épousaient une silhouette qui leur semblait coller au poste de second. Josiane vécut très mal cette stratégie. Pour une fois que son physique la mettait en valeur, il fallait que ces mégères la dissimule par leur ressemblance. Elle se vengea en répandant sournoisement la rumeur de l'homosexualité de Laure. La gente masculine, désemparée, retourna son obsession dans les bassesses de l'ambition.

 

Le combat faisait rage depuis quatre mois lorsqu'à la veille des grandes vacances, je déclarai avoir fait mon choix. Je convoquai tous les professeurs un samedi matin. Aucun d'eux ne se plaignit de l'empiètement sur un jour de repos et tous furent ponctuels. J'avais fait préparer le réfectoire afin que mon assemblée puisse m'entendre en même temps qu'elle dégusterait des croissants. J'ai toujours pensé que les grandes annonces passaient mieux la bouche pleine.

Carminatto vint accompagné de ses enfants. Une lettre anonyme l'accusait de tromperie et sa femme en avait profité pour partir avec son amant. Josiane, le sac au bras de cire, mâchonnait ses lèvres. La tension qui torturait son visage évoquait ses rêves en couleurs ; on la sentait inapte à la désillusion.

Thierry, en habitué des échecs, ne s'imaginait rien. Il était présent parce que je le lui avais ordonné. Il profitait du spectacle et des viennoiseries, muet aux salutations. Je grimpai sur l'estrade, vigoureux et souriant. La totalité des professeurs optèrent pour une position d'écoute polie. Tous liés derrière le café, tous désunis face à la promesse du poste de second.

"Chers amis, chers collègues. En tant que directeur du collège St Joseph, j'ai l'honneur de vous présenter ma future femme, Laure Calvi bientôt madame Genévrier. De plus je la nomme second de l'établissement. Le collège y gagnera en efficacité et en rendement."

 

Un brouhaha envahit la salle. Les véhémences s'exprimèrent en volées de miettes. A demi-étouffée, l'assemblée accueillit Laure avec dégoût et amertume. Tous voyaient là une calculatrice qui les avaient dupés. Les femmes insultaient sa jeunesse, les hommes ses seins. Jamais ils ne pensèrent que j'avais usé de ma fonction pour attirer la belle. Trop obnubilés par leurs conflits, ils avaient excellé dans les chausse-trappes dégageant la voie de ma proie. Les délices de Sade me revinrent en mémoire. L'innocente enseignante se joignait à moi pour rire de la médiocrité de ses collègues ignorante de mes desseins. Quelles délices que la confusion empourprant ses jours lorsqu'elle comprit mon stratagème. Farouche, elle succomba à mon désir dès lors que j'évoquais l'amour, le mariage et la famille à l'ancienne. Elle sera une épouse parfaite, si agréable à tromper.

 

Parce qu'il n'y a pas meilleure source de satisfaction que le pouvoir.

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4 août 2014 1 04 /08 /août /2014 09:10

 

Il y a des enfants qui méritent qu'on les abandonne. Quand tu vois ce que Léopold est devenu, je me dis que je n'aurais jamais pu le regarder grandir. D'ailleurs, si on y réfléchit bien, c'est valable pour pratiquement tous les enfants. Il faut avoir donné vie à un personnage telle qu'Edith Piaf pour être fière de sa maternité !

Moi, dès que j'ai vu Léopold, j'ai su qu'il ne serait rien. Je ne l'ai pas supporté, j'ai préféré le donner à une voisine...à condition qu'elle déménage. D'une pierre deux coups comme on dit ! Du vent, la jeunette qui pleurait sans cesse son infertilité. Je lui ai redonné le sourire, elle m'a fichu la paix.

Quoique...au début elle m'écrivait, elle m'envoyait même des photos du petit...les plus belles...elle voulait peut-être que je le reprenne...elle aussi s'apercevait que Léopold ne serait rien d'autre qu'un être quelconque ? Jamais je n'ai répondu. J'ai attendu qu'elle se lasse.

 

Léopold, c'est le nom de son géniteur. Ah ! Je l'ai aimé son père. Il était beau, marin et le sang chaud. Il a pris un mauvais couteau dans une rixe. Il s'en est pas relevé. J'ai reporté tout mon amour sur mon ventre. Neuf mois de passion nombrilaire pour ça. Il faut croire que trop, ça gâche. Ah quand je l'ai vu ! Un froid m'a glacé la nuque, déchaussé les dents. J'ai refusé de le toucher. La sage-femme l'a mise en couveuse et durant deux heures je l'ai vomi des yeux. Quelle laideur, quelle prévisibilité dans ce visage. Son existence se dessinait dans chacun des plis de sa peau, la médiocrité s'exhalait de son faciès, l'inintérêt suintait de ses courbes. C'en fut trop, je m'endormis sur ce cauchemar.

Au réveil, j'espérais en une tromperie de la fatigue. Je me glissais à la nurserie souhaitant qu'au milieu de toutes ces larves, il ne se démarque pas. Dans l'anonymat des berceaux, parmi tous ces bouts de chairs, un seul exposait son incapacité au mystère, un seul affichait la certitude d'aucun devenir et c'était celui de mes entrailles. Je fus tentée d'échanger les prénoms avec un joli poupon, un bébé rose, silencieux, les yeux grands ouverts, mort ou en plastic...mais je ne pus tant son patronyme exprimait la stupide adoration anglo-saxonne.

 

J'ai alors patienté, simulé un attachement par-dessus un dégoût qui croissait au fil des jours. Et puis l'idée de l'abandon a germé. Elle a poussé comme un lierre grimpant. J'en fus couverte au point d'oublier parfois l'existence du gnome. Par peur d'un insanité qui me priverait de liberté, j'ai réfléchi à l'élégance d'une séparation. Et le don m'est apparu comme le plus noble des sacrifices. je devenais une sainte et surtout j'effaçais de mes yeux et de mon cœur cet affreux asticot.

 


 

Hier j'ai vu ma mère pour la première fois. Elle promenait son chien dans un square vide. Un truc pas plus gros qu'une courgette se faisait sermonner à chaque fois qu'il avançait trop vite ou qu'il traînait.

Je me suis approché et je lui ait dit :

- Pourquoi ne pas l'abandonner si vous ne l'aimez pas ?

Elle m'a fixé pendant une lourde minute et elle a susurré au milieu d'un sourire :

- J'avais raison. Tu ne ressembles à rien.

Elle a continué à me regarder, immobile, accablée par ce qu'elle voyait.

Grande, blonde, le nez furet dans un manteau de lapin, elle incarnait toute l'élégance d'une mère dépourvue d'instinct maternel. Elle flanqua un coup de pied à Pétrus pour qu'il fasse demi-tour et s'extirpa du square sur la pointe de ses talons aiguilles.

Je la rattrapais avant qu'elle ne disparaisse dans la foule des boulevards.

- Nous pourrions peut-être prendre un café ?

Elle se raidit et sans se retourner elle aboya :

- un cognac, en terrasse, si tu ne crains pas le froid.

Nous marchâmes côte à côte. Moi scrutant son profil, elle le regard droit devant, glaçant l'horizon. Pas un mot ne fut échangé avant que nous nous assîmes seuls à un bistrot crasseux.

Attablée, elle sortit une bague à tabac et au milieu de ses doigts manucurés elle glissa une feuille à papier blanc. Avec grâce et souplesse, elle roula une très fine cigarette qu'elle éclaira d'une allumette. La fumée s'accrochait à ses cils qui semblaient battre d'ennui.

- Pourquoi m'avez-vous abandonné ?

Sans tressaillir ni même réfléchir, elle répondit instantanément :

- Tu suintais la médiocrité.

En lourd silence tomba sur la table métallique blanche constellée de minuscules éclats de rouille.

Elle but d'un trait son cognac, les yeux clos, les respiration en suspend. Son image demeura longtemps figée ainsi dans mon esprit alors que son chien gémissait après un sucre qu'elle maintenait au-dessus de sa gueule depuis que nous étions assis.

- J'ai une femme et deux enfants marmonnais-je honteusement et je...

- Ce n'est tout de même pas pour me présenter tes chiards que tu m'as retrouvé ?

- Non, non...pas du tout...c'est que je...je les ai abandonné...

Aucune émotion ne perturba sa pose. Elle concéda enfin la friandise à Pétrus. D'une voix monocorde, elle affirma sans me regarder :

- C'était la meilleure chose qui pouvait leur arriver.

Puis elle se redressa, déposa un billet et tira sur la laisse.

Je restais sur ma chaise, vide, perdu, jusqu'à ce qu'elle disparaisse au loin.

 

 

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30 juin 2010 3 30 /06 /juin /2010 18:02

 

Aujourd’hui je fête l’anniversaire de notre séparation.  

Cela fait bientôt six mois que nous ne nous regardons plus.

Parce qu’elle m’observait autant que je l’admirais.

Mais un soir, je l’ai jetée par la fenêtre.

Il était 20h03. La chaleur de la journée laissait place à une douce tiédeur estivale.

Pour fêter le week-end, nous sirotions un château Segur 2000, debout dans le salon.

Et puis, subitement, un bruit de trop ou une image insoutenable. Je l’ai défenestrée.

Elle s’est répandue sur les dalles de la terrasse, sans ostentation de mauvaise aloi ;

peut-être même avec art, si bien qu’elle y demeure encore.

 

Au début, je n’ai pas spécialement ressenti de délivrance ni de manque.

Elle avait disparu comme si jamais je ne l’avais pas connue.

Au-delà de la présence ou de l’absence. L’inexistence.

Ce n’est que maintenant que je m’aperçois des changements en profondeur.

Je ne suis plus effrayé lorsque je croise une bande de jeunes qui s’expriment avec force de cris.

Je n’imagine plus qu’ils sont une menace mais qu’ils dégagent l’énergie de leur âge. Et je souris.

D’ailleurs je souris énormément depuis que je marche la tête haute, sans crainte de mon prochain.

Parfois si haut que je découvre les différentes teintes du ciel. Extraordinairement, il n’est pas que de gris.

Certains bleus sont magnifiques ; j’ai même découvert que la pluie ne tombait pas sur nos chaussures pour nous ennuyer. Aussi anodin que cela puisse paraître, une véritable révolution s’opère en mon esprit depuis qu’elle gît sur la terrasse.

Je suis libre d'apprécier, de ressentir, d'aimer. J'ai le temps de déambuler, de sourire et de regarder depuis que je me suis séparé de ma télé.

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30 juin 2010 3 30 /06 /juin /2010 17:59

 

Hier, j'ai dû me résigner à prendre les transports en commun faute de chauffeur. Et quelle ne fut pas ma terreur de devoir me fondre dans la masse des gueux. Pire que la crasse et les parfums bon marché, le plus insupportable se loge dans leur son.

 

Comment décrire la mélodie de la pauvreté ? Comment exprimer cette insupportable lourdeur d'être ? En chacun d'eux réside, et ce même pas au niveau du soupçon mais bien en quantité exagérée, une incapacité au savoir-vivre, une cuistrerie qui confine l'inélégance à l'habit quotidien.

 

Et cette exaspérante bassesse s'allie à une laideur physique qui place la femelle du pauvre au rang du bovidé. Le poil gras, le double-menton et l'œil torve de l'alcoolique... je comprends qu'elle se réfugie dans la contemplation de nos compagnes qui s'affichent généreusement en double-page glacées des revues bon marché. Quelle grandeur d'âme que celle de nos femmes. Elles offrent du divin à peu de frais tout en se faisant insulter à longueur de pages par les doigts rongés des caissières de supermarchés.

 

Quant à l'homme, il est aussi terne que sa condition. Plat, sans relief ni horizon ; sans profondeur ni raison. Le vent balaye perpétuellement son cerveau où grincent quelques borborygmes qu'il ose appeler pensée !

 

Et le pire dans tous cela, c'est que ce vide a de l'orgueil ! Comme tout pauvre, il aspire à la richesse ! Comme tous les petits, il mime la grandeur. Mais point de comédie ni de tragédie, tout est joué avec sérieux. Mais peut-on parodier l'abondance avec talent lorsqu'on nait pauvre ?

 

Je ne vois dans tous ces visages des satisfaits, des résignés, des maudits.

 

Les premiers portent, tout sourire, l'éclat de leur servitude. Certainement qu'ils torturent plus qu'ils ne s'aliènent. Oublient-ils leurs chaînes dans la souffrance de leurs semblables ?

 

Les seconds grisent leur déception d'un lourd voile de brume. Des espoirs de gloire oubliés dans les boues de la condition humaine. Ne s'aperçoivent-ils pas qu'il faut être fils de... pour réussir ? Nous en élevons un par loterie et la masse le contemple ébahie, avant de gratter avec plus de furie les tickets vides.

 

Et les derniers, la lie de la société, ceux dont l'originalité condamne. Trop gros, trop laids, trop bêtes... trop ou pas assez, mais de combien ? Et ils cherchent...

Tous des abrutis...

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2 novembre 2006 4 02 /11 /novembre /2006 12:18

- Je est un autre
- Certes mais l'autre est un con
- Alors Je est un con ?
- Oui et non. C'est un autre con...un parmi tant d'autres.

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4 octobre 2006 3 04 /10 /octobre /2006 11:28

- De quoi souffrez-vous ?
- De pauvreté.
- Des antécédents familiaux ?
- Pas que je sache. Mon père était ingénieur. Quant à ma mère, elle a élevé ses cinq enfants.
- Elle n'a jamais travaillé ?
- Si. Elle a tenu le foyer.
- Je veux dire, elle n'a jamais créé de richesse ?
- Heu...juste du bonheur.
- Du bonheur ! Vous avez que ce mot à la bouche, vous, les pauvres ! Ca vous nourrit le bonheur ?
- Disons que maintenant, je ne vis plus que sur des souvenirs de joie parce qu'au quotidien, c'est plutôt désespoir et misère.
- Quel emploi occupez-vous ?
- Aucun.
- Ben voyons. Quelle faute avez vous commise pour ne pas mériter un travail ?
- Comme tout le monde. Des études.
- Des études de quoi ?
- De littérature.
- Vous l'avez bien cherché ! Vous vouliez devenir quoi ? Littérateur ?
- Je voulais...je voulais...je ne sais plus ce que je voulais.
- Vous ne vouliez rien ! Sinon, vous auriez fait de vrais études comme la plomberie, la maçonnerie, l'informatique, la restauration... Et vous ne seriez pas en train de pleurer dans mes jupes. Parce que du travail, il y en monsieur ! Mais il faudrait voir à chercher du bon côté.
- Je ne me sens pas l'âme d'un plombier ni celle d'un informaticien. Moi ce sont les livres qui m'intéressent. La culture...
- La culture mène à la misère. Venez pas vous plaindre. C'est de votre faute ! Si encore vous travailliez, votre pauvreté serait plus supportable. Mais là, vous êtes une entrave au bien-être de la collectivité. Parce que vous voudriez évidemment que je vous prescrive un RMI. C'est bien pour cela que vous êtes venu ? N'est-ce pas ?
- C'est que...je n'arrive plus à subvenir à mes besoins.
- On n'en prescrit plus ! Surtout en période d'emplois. Allez faire maçon, ça vous guérira.

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2 octobre 2006 1 02 /10 /octobre /2006 14:39

Foi

Attablé de force au chevet du condamné, le prêtre s'ingénie à dissimuler l'opacité de sa foi et simule l'allégresse du prochain paradis alors que l'aubergiste égorge les derniers invités par mégarde.
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